2001-2004

Paquets de nerfs

La Nature morte m’a intéressée parce qu’elle était considérée comme un genre pauvre; aussi elle représentait des espaces, des objets, les restes de choses et de gestes appartenant à un univers réservé aux femmes.

Un jour, à l’atelier, j’ai automatiquement déplacé un morceau de ruban gommé usagé, d’un tableau grand et en fabrication, vers un autre tableau plus petit que je voulais faire disparaître sans savoir trop comment. Ainsi, j’ai commencé à enrubanner, emballer, emmailloter ou bander des tableaux qui ne trouvaient pas leur sens dans leur première version.

C’est alors que me suis rendue compte que j’étais, et cela depuis toujours, travaillée par l’idée de « reste ». Des retailles, des bribes, des fragments, des bouts… Des restes pas que dans l’assiette de la peinture mais dans l’Histoire et dans les histoires racontées sur et par des femmes. Ces restes, je ne faisais pas que les représenter ou les évoquer ; ils étaient LE matériau premier, tant conceptuellement que matériellement.

Acrylique sur toile de coton et ruban gommé 
Une centaine de tableautins de 13 x 18 cm chacun
Une quinzaine de tableautin de 23 x 31 cm chacun
Un tableau de 114 x 167,5 cm
Deux tableaux de 124 x 250 cm chacun

Collections

6 tableautins dans la Collection du Musée national des beaux-arts du Québec
(2006.03-08)
Achat grâce à l’appui du Conseil des arts du Canada dans le cadre de son programme d’aide aux acquisitions

Collections particulières

Collection de l’artiste

Historique d’exposition

2020-2022 – Les ouvrages et les heures, exposition individuelle au Musée d’art de Joliette (1er février – 6 septembre 2020), circulation au MA – Musée d’art de Rouyn-Noranda (26 mars – 16 mai 2021) et au Musée du Bas-Saint-Laurent (Rivière-du-Loup, 8 octobre 2021 – 30 janvier 2022), commissaire : Anne-Marie St-Jean Aubre

2011-2012 – Monique Régimbald-Zeiber : Les dessous de l’histoire (2), exposition individuelle à la Galerie B-312, Montréal (2 décembre 2011-21 janvier 2012).

2004 – Le touché de la peintureFrançoise Sullivan, Monique Régimbald-Zeiber et Aïda Kazarian, exposition de groupe à la Galerie de l’UQAM, Montréal (7 mai – 19 juin), commissaire: Louise Déry.

Publication

Anne-Marie St-Jean Aubre, Monique Régimbald-Zeiber et al. Les ouvrages et les heures… et les restes, 2020, Joliette, Rouyn-Noranda et Montréal : Musée d’art de Joliette, MA – Musée d’art de Rouyn-Noranda et Éditions les petits carnets, 131 p.

 

paquet de nerfs
dans l’atelier corps
mains écoutent
on entend presque
– quels sont tes rêves ton histoire
comment as-tu affronté ce à quoi ton nom de femme te consigne
conscrite à quelle tâche
qui as-tu espéré nourri porté attendu consolé chéri habillé perdu aimé        et aimé
pour toujours
ta voix
quelle inflexion dans la nuit quand tu appelles
et qui t’a répondu? –

 

 

Les Paquets de nerfs aux textures raboteuses suggèrent ainsi les vergetures, la cellulite ou la couperose, ces défauts de surface qui prouvent la faillibilité du modèle de la beauté parfaite en préfigurant ce que cette peau dissimule : les entrailles, les tripes, la viande. Tendant vers l’abject, ces œuvres-bandages suintent métaphoriquement de cette substance qui compose notre «centre» – notre intériorité, tant physique que psychologique –, insinuant la violence dont elle est parfois l’objet.

 

 

1- Johanne Jarry, p. 89
2- Anne-Marie St-Jean Aubre, «la commissaire», p. 32

Dans Anne-Marie St-Jean Aubre, Monique Régimbald-Zeiber et al. Les ouvrages et les heures… et les restes, 2020, Joliette, Rouyn-Noranda et Montréal : Musée d’art de Joliette, MA – Musée d’art de Rouyn-Noranda et Éditions les petits carnets, 131 p.

 

La voix de Nicole Brossard tient une place centrale dans mon atelier. Elle signe, en 1982, un livre qui s’intitule Picture Theory que je continue de trouver beau, étrange et par moment assez agaçant. Elle y dit :

 

À la source de chaque émotion, il y a une abstraction dont l’effet est l’émotion mais dont les conséquences dérivent la fixité du regard et des idées. Chaque abstraction est une forme dans l’espace mental. Et quand l’abstraction prend forme, elle s’inscrit radicalement comme énigme et affirmation. Avoir recours à l’abstraction est une nécessité pour celle qui fait le projet, tentée par l’existence, de traverser les anecdotes quotidiennes et les mémoires d’utopies qu’elle rencontre à chaque usage de la parole.

 

Ce sont ses mots. J’aime comme elle associe l’abstraction à l’émotion et à la forme.

Pour moi l’abstraction est iconoclaste, littéralement. L’abstraction est partout dans l’atelier. Au cœur de la pensée de la pratique de l’art, elle bouscule, triture, déchiquette, brise, défait les images. Elle est espace de résistance, une sorte de cri, une émotion. Ma peinture se refuse à figurer. La non figuration c’est l’abstraction appliquée à la peinture.

S’abstraire de l’image c’est agir…  dans l’atelier.

Quand je sors de l’atelier, je tourne le dos à l’abstraction… Ensuite, j’y reviens.

 

HAUT DE LA PAGE